Points saillants
- Le gouvernement américain semble faire beaucoup de demandes et bien moins de concessions lors des renégociations de l’ALÉNA.
- Le gouvernement du Canada a clairement indiqué qu’il ne négocierait pas en public ou par l'entremise des médias.
- Les PLC étaient présents sur le terrain à chacune des rondes de renégociations et continueront de travailler en étroite collaboration avec leurs partenaires.
Le gouvernement du Canada a clairement indiqué qu’il ne négocierait pas en public ou par l'entremise des médias. Les Producteurs laitiers du Canada (PLC) respectent ce choix. Cependant, inutile de préciser que les PLC ne sont pas surpris de la position des États-Unis; leurs demandes quant aux produits laitiers et aux autres produits visés par la gestion de l’offre sont comparables à celles qu’ils ont présentées pour l’ensemble des secteurs – elles sont scandaleuses.
Toutes les demandes des États-Unis, dans tous les chapitres de ces négociations, sont un déni manifeste de la souveraineté canadienne et mexicaine. Collectivement, elles représentent une tentative flagrante de l’administration américaine de créer une économie internationale où toutes les autres nations sont asservies aux États-Unis – une économie où la politique intérieure américaine passe avant toutes les autres. Heureusement cela ne deviendra jamais la réalité.
Il ne s’agit pas ici de « L’art de la négociation », et renégocier l’ALÉNA n’est pas la même chose que négocier agressivement la construction d’un édifice à Manhattan. Contrairement aux offres publiques d’achat rédigées dans une salle de conférence, la seule manière de concrétiser un accord commercial entre des nations souveraines est de parvenir à un résultat qui apporte à toutes les nations participantes des bénéfices tangibles. Or, si l’on se fie aux demandes que les Américains ont faites dans ces négociations jusqu’à présent, les États-Unis visent un ALÉNA renégocié qui leur serait beaucoup plus favorable, et qui le serait bien moins pour le Canada et le Mexique. Contrairement à une négociation d’affaires où, dans certains cas, l’une des parties n’a pas le choix de consentir à des demandes injustes, d’aucune façon une nation souveraine qui se respecte ne devrait accepter un accord commercial qui la laisse dans une situation pire que celle où elle se trouvait au départ.
Malheureusement, l’approche du président Trump indique clairement jusqu’à présent qu’il voit le Canada et le Mexique non pas comme des nations souveraines, mais bien comme des États clients. Avec tout le respect qu’on lui doit, le président Trump est peut-être le dirigeant des États-Unis, mais il n’est pas le premier ministre du Canada ni le président du Mexique; il n’a donc aucun pouvoir sur les politiques intérieures canadiennes ou mexicaines. Si l’objectif de la renégociation de l’ALÉNA est d’annexer le Canada et le Mexique au territoire américain, le président devrait être honnête et le dire! En revanche, si l’objectif est de parvenir à un accord mutuellement bénéfique qui ne constitue pas un suicide politique pour l’une des trois nations en question, alors les États-Unis devraient peut-être repenser leur approche.
Les PLC étaient présents sur le terrain à chacune des rondes de renégociations, et nous continuons de travailler en étroite collaboration avec nos membres provinciaux, l’Association des transformateurs laitiers du Canada (ATLC), et nos partenaires des secteurs sous gestion de l’offre (poulet, œufs, dindon et œufs d’incubation) dans ce dossier. Plusieurs de nos membres provinciaux ont pris part aux rondes antérieures de négociations de l’ALÉNA. Nous avons participé aux réunions ensemble, comparé nos notes, partagé de l’information et élaboré des stratégies – les producteurs laitiers peuvent donc être rassurés par le fait que nous ne sommes pas seuls à être confrontés à ce défi; le secteur de la gestion de l’offre en entier est uni. Je m’attends à ce que le contingent des PLC prenne de l’ampleur alors que les rondes continueront de se succéder; il est en effet possible qu’un plus grand nombre de représentants des membres provinciaux se joignent à nous sur le terrain.
Les PLC maintiennent une excellente relation avec le gouvernement du Canada et l’équipe de négociations canadienne, qui diffusent l’information à nos représentants à mesure qu’elle leur est disponible. Les lignes de communication sont ouvertes et sont fréquemment utilisées, à notre plus grande satisfaction; le Cabinet du premier ministre et le Cabinet de la ministre Freeland sont toujours disponibles pour rencontrer les PLC et répondre à nos questions. Le gouvernement a très clairement indiqué qu’il continue de soutenir la gestion de l’offre et le secteur laitier. Nous sommes convaincus qu’il restera fidèle à sa parole.
Le secteur laitier n’est pas un enjeu décisif de l’ALÉNA
Au Canada, une grande attention a été accordée à l’impact du secteur laitier sur la renégociation de l’ALÉNA; cependant, il est important de garder en tête que pour les États-Unis, le secteur laitier est plutôt bas sur la liste des priorités. En effet, de nombreux secteurs ont un impact beaucoup plus important sur l’économie américaine que le secteur laitier, notamment l’automobile, l’acier et les textiles, pour n’en nommer que quelques-uns. De plus, lorsqu’il est question du secteur laitier, il n’y a pas vraiment de « problème » à régler; les États-Unis profitent déjà d’une balance commerciale positive de 5 pour 1 avec le Canada. Le seul problème qui nuit actuellement à l’industrie laitière américaine est sa propre surproduction. Cependant, comme nous l’avons déjà mentionné dans un billet de blogue antérieur, le Canada est moins peuplé que l’État de la Californie, et il est déjà saturé avec du lait canadien de qualité supérieure. Pour l’industrie laitière américaine, le marché canadien n’est pas un sauveur, ce n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan. Lorsqu’il est question de produits laitiers, la seule solution au problème des États-Unis est de réglementer leur production; ce n’est pas d’écouler leur lait hautement subventionné au Canada.
Rien n’est plus comme avant sur la scène internationale depuis l’élection du président Trump; et la renégociation de l’ALÉNA n’échappe pas à cette réalité. Si l’objectif de l’équipe des États-Unis est réellement de conclure un ALÉNA renégocié dont les trois pays sortent gagnants, alors elle devrait peut-être ajuster son approche et proposer des éléments qui peuvent être abordés de manière constructive. En l’absence d’une telle approche, la probabilité que le Canada ou le Mexique acceptent des demandes rigides et injustes est pratiquement nulle.
Heureusement pour les citoyens du Canada et du Mexique, nous ne sommes pas dans un épisode de « The Apprentice ». Lorsqu’il est question de l’ALÉNA, aucun de nos gouvernements ne peut être renvoyé par le président Trump s’ils ne lui donnent pas la réponse qu’il veut entendre.