Remettre le prix du lait et du beurre en perspective devant la menace de l’inflation pandémique pour les producteurs laitiers

Depuis près de deux ans, les producteurs laitiers, tout comme d’innombrables petites entreprises et membres des divers secteurs de notre économie, travaillent d’arrache-pied pour s’adapter aux conditions sans précédent suscitées par la pandémie de COVID-19.  

La pandémie a suscité une forte inflation qui n’épargne personne, y compris les producteurs laitiers. Par exemple, le coût des aliments pour animaux a grimpé de 27 % en deux ans, tandis que celui du carburant est en hausse de 30 % et celui des semences, de 20 %. Le coût de la machinerie agricole, déjà élevé avant la pandémie, a subi une augmentation de 20 %. Disons qu’il n’y a aucune commune mesure avec l’achat d’une simple perceuse pour notre boîte à outils à la maison.

La Commission canadienne du lait a récemment annoncé une augmentation du prix du lait et du beurre à la ferme. Cet ajustement entrera en vigueur sous peu. La hausse décrétée ne couvrira pas entièrement l’augmentation des coûts de production. Les producteurs devront s’adapter à cette réalité. Je n’irai pas par quatre chemins : personne ne cherche à exploiter les consommateurs. Toutefois, les Canadiens auraient beaucoup à perdre s’ils laissaient l’inflation acculer leurs producteurs laitiers à la faillite.

Les critiques du secteur laitier prétendent que l’augmentation n’est pas étayée par une justification claire. Pourtant, la Commission, une société d’État indépendante, a donné des explications noir sur blanc. L’augmentation du prix à la ferme était nécessaire pour éviter que la production laitière devienne déficitaire dans le contexte économique actuel.

La Commission a indiqué que les producteurs laitiers encaissaient des pertes d’exploitation à cause de l’augmentation des coûts de production, notamment ceux des aliments pour animaux, du carburant et des engrais. Remettons les pendules à l’heure : il ne s’agit pas d’engraisser la marge bénéficiaire des producteurs laitiers, mais de leur permettre de récupérer en partie l’augmentation de leurs coûts de production au cours des deux dernières années.

Avant d’annoncer cet ajustement de prix, la Commission a consulté des regroupements de producteurs, de transformateurs, de consommateurs, de détaillants et d’entreprises de services alimentaires. Je dois avouer que comme consommateur, j’aimerais que le prix de mes autres aliments soit établi avec la même transparence que celui du lait. À quand remonte la dernière fois où un détaillant vous a consulté et fourni une justification avant de procéder à une hausse de prix?

Il faut ajouter que les critiques du secteur laitier présentent un portrait fragmentaire de la situation. Selon nos estimations, si l’augmentation du prix à la ferme se répercutait entièrement dans les prix au restaurant, on parlerait d’une hausse de 1 cent pour un verre de lait ou de 4 cents pour une pizza moyenne. À l’épicerie, le contenant de yogourt de 650 grammes coûterait 12 cents de plus, et le prix de l’emballage de 450 grammes de fromage cheddar augmenterait de 26 cents.

De toute évidence, le coût du panier d’épicerie est un enjeu important. Les Canadiens devraient toutefois garder à l’esprit que les mécanismes de détermination des prix ont leur raison d’être. Enfin, la relance économique s’appuie sur un effort collectif. Les consommateurs peuvent avoir l’assurance que les producteurs laitiers continueront à fournir du lait de qualité supérieure et à alimenter une reprise forte au cours des mois et des années à venir.

Pierre Lampron est le président des Producteurs laitiers du Canada